Flore alpine : diversité, espèces menacées et pâturages

Flore alpine : diversité, espèces menacées et pâturages

Flore alpine : diversité, espèces menacées et pâturages

Les deux Savoie représentent la première destination touristique annuelle. Plébiscitées pour les vacances d’hiver avec leurs nombreuses stations de ski, elles accueillent également de nombreux touristes l’été. La zone Savoie Mont Blanc est ainsi la première destination montagne sur les deux saisons.

Les beaux jours arrivent et peut-être avez-vous planifié de profiter du plein air et des paysages savoyards. De nombreuses randonnées vous attendent et à cette occasion, vous pourrez découvrir la diversité de la flore locale, qui colore les abords des sentiers et qui parfume aussi les fromages de Savoie.

 

La flore de Savoie et Haute-Savoie, un trésor de la nature

 

Des espèces de fleurs montagnardes différentes selon l’altitude

 

A chaque étage de la végétation correspond un écosystème bien défini.
La flore de montagne présente d’importants contrastes à mesure que l’on monte en altitude. La végétation se répartit en effet en une succession d’étages dont les limites varient, notamment selon l’exposition. Ainsi, on parlera habituellement d’Ubac et d’Adret pour désigner, respectivement, les versants à l’ombre ou exposés au soleil. Au sein de cet étagement, on distingue nettement les transitions de végétation :

·   A l’étage collinéen, situé entre 200 et 1000 m d’altitude, on trouve les forêts d’arbres à feuilles caduques, essentiellement le chêne et le hêtre.
·       Plus haut, entre 1000 à 1500 m d’altitude, l’étage montagnard accueille le pin sylvestre, le sapin et l’épicéa et le mélèze. Au sol on trouve le rhododendron, les myrtilliers, le lys martagon ou le lys des montagnes. C’est l’altitude des prairies issues des activités humaines.
·       L’étage subalpin, à partir de 2000 m d’altitude, est celui des premiers alpages. Pour mémoire ce sont ces pâturages d’herbes et de fleurs qui ont donné leur nom aux Alpes. On trouve à cette altitude les landes où se développent des arbustes de taille réduite. C’est le domaine des pelouses alpines et des rochers colonisés par une végétation spécialisée.
·   Enfin, juste avant l’émergence du monde minéral et des hauts sommets se trouve l’étage nival qui accueille les premières neiges d’automne. Là-haut, entre 2500 et 2800 m d’altitude, la végétation se fait plus rare : quelques fleurs mais surtout des rochers colonisés par les mousses et les lichens. On arrive dans le monde des roches et des glaciers.

Flore savoyarde alpage haute savoie pochat

Flore des Alpes – © Axiuba

Plus de 3000 espèces de fleurs alpines

Impossible ici de vous présenter les plus de 3000 espèces de la flore alpine. En général on estime qu’une quarantaine d’espèces végétales au mètre carré sont présentes en alpage, voire même parfois jusqu’à 80 espèces. Quand les prairies d’altitude sont les plus flamboyantes, allez faire un tour là-haut et vous serez émerveillés par tant de beauté et de couleurs. A marcher le nez dans les fleurs, vous comprendrez aisément pourquoi les belles tarines sont toujours le museau au sol. Mais attention, elles ne sont pas pour autant de voraces écervelées et elles savent très bien reconnaitre d’instinct les fleurs et les plantes toxiques pour elles. Comme le verâtre qui ressemble à la gentiane et qu’elles ne touchent jamais.

Vache tarine pâturage fleur Savoie Pochat

© AFTALP

Généralement les alpagistes sont de vrais botanistes. En montagnards avertis, ils savent reconnaitre les plantes. Les plantes utiles comme le génépi, la bourrache, la grande camomille, l’alchémille, le serpolet, le millepertuis, la pensée sauvage, le bouillon blanc ou le tussilage. Ou celles qu’il faut protéger : le lys martagon, les délicates orchidées, le chardon argenté et l’emblématique edelweiss.

 

Une flore menacée que tout le monde doit protéger

 

En Haute-Savoie, comme dans tous les massifs, la liste de la flore menacée et protégée est longue et nous vous conseillons de vous reporter à un ouvrage édité par le Département de la Haute-Savoie, Asters, Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Savoie, et le Conservatoire Botanique National Alpin, acteurs de la préservation des espaces naturels du territoire,« La flore rare et menacée de Haute-Savoie ». Cet ouvrage s’appuie sur un long travail d’inventaire mené par le botaniste Denis Jordan et présente les 395 espèces qui ont fait chacune l’objet d’une attention particulière pour leur rareté et/ou leur valeur patrimoniale.

Lys Martagon flore savoyarde alpage haute-savoie Pochat fleur

Lys Martagon – © Axiuba

Aujourd’hui de nombreuses actions se mettent en place pour protéger cette nature dont nous avons tant besoin. Sur un siècle, des dizaines de milliers d’hectares de pâturage ont disparu dans les Alpes, 30 000 hectares dans les Alpes du Nord. Ce phénomène trouve sa source dans l’extension des forêts et des broussailles du fait de la diminution du nombre d’agriculteurs et dans l’extension urbaine. Les domaines skiables ont, quant à eux, engagé une démarche de remise en état des sols après les travaux de pistes. Après les travaux en zone d’alpage, il est aujourd’hui admis que la revégétalisation des sites doit se faire d’une manière écologique et surveillée avec l’utilisation de semences endémiques. Celles-ci sont prélevées en montagne et mises en culture pour pouvoir, quand c’est nécessaire, replanter sans détruire l’équilibre de la biodiversité locale. Un engagement essentiel pour la qualité des fourrages.

 

Flore et fromages font bon ménage

 

Le bon lait des alpages aux saveurs florales

 

Les Alpes et plus particulièrement les Pays de Savoie sont réputés pour leurs fromages. Et pour cause ! A la source, il y a le bon lait de montagne, inscrit dans l’imaginaire alpin. Les poètes n’hésitent pas à parler de voie lactée… Avec en toile de fond une note de paradis parsemée de fleurs et de plantes sauvages. Le tableau est complet. Ajoutez-y des images de troupeaux paissant tranquillement là-haut sur les alpages, de chalets parsemés jusqu’aux plus hautes altitudes et vous aurez la réponse sur l’origine des saveurs incomparables des fromages de montagne au lait cru.

La flore de montagne est d’une incomparable beauté et un exemple saisissant de l’adaptation de la nature aux conditions les plus extrêmes. Autrefois utilisée dans l’herboristerie familiale, la fleur de montagne a vécu bien des histoires. Les colporteurs les faisaient voyager comme des marchandises précieuses et utiles, les scientifiques les étudiaient et les commerçants en faisaient des souvenirs pour les touristes venus découvrir les montagnes.

En en parallèle de ces activités, les alpagistes ont su très tôt que la saveur du lait produit sur les alpages en pleine floraison était unique et donnait aux fromages de montagne toute leur richesse.

 

« Là où est l’herbe va le troupeau »

 

Traditionnellement, dès le mois de juin, quand la neige a disparu, les troupeaux sortent des étables et rejoignent progressivement les alpages d’altitude, au fur et à mesure de la poussée de l’herbe. Il leur faudra un bon mois pour arriver aux prairies d’altitude situées entre 1200 et 2500 mètres. Ce mouvement du bétail allant à l’estive s’appelle « la remue » et c’est ce qui explique la dispersion des chalets d’alpage, les refuges des bergers et des alpagistes. Matin et soir les bidons de lait posés après les traites au bord des sentiers et des chemins témoignent de cette activité ancestrale. Les troupeaux redescendront de la même façon jusqu’en octobre au rythme de l’arrivée du froid et de la neige.

Alpage Beaufort vache savoie Pochat

Troupeau de tarines en alpage

Le pâturage des troupeaux assure donc l’entretien de ces prairies et des alpages. Et pastoralisme et flore de montagne font bon ménage. Le lait ainsi produit tient sa saveur de la diversité des plantes. Selon l’INRA, « ce lait a une composition particulière liée au pâturage des prairies et à leur biodiversité. Cela joue essentiellement sur la matière grasse, notamment les teneurs en acides gras polyinsaturés (oméga 3 et acides linoléiques conjugués) ». Le plus intéressant viendrait de la présence de fortes senteurs provenant des plantes aromatiques et qui passent dans le lait. Un lait des alpages qui sentirait le thym, le serpolet, le genépi, la sauge, ça donne envie non ?

 

Les fromages au lait de printemps bénéficient de cette diversité florale

 

Les alpages des Pays de Savoie, situés entre 1200 et 2500m d’altitude, sont donc avant tout une ressource en nourriture pour les troupeaux pendant la période estivale, quand l‘herbe est la plus nourrissante. C’est de là que nait la merveilleuse alchimie entre la flore et le lait cru. Le secret des vaches heureuses et des gourmands ravis!

Tout compte et c’est le travail dur et quotidien de l’alpagiste : choisir les bonnes prairies, déplacer les parcs selon la pousse de l’herbe et des fleurs, et prendre soin de la santé du troupeau. On dit qu’un orage en montagne influence la qualité du lait. C’est dire !

 

De façon générale, les fromages issus d’alpages sont riches en vitamines A et E, riches en acides gras à longue chaîne et pauvres en acides gras saturés. La composition des sols et de la flore influe fortement sur le goût du fromage. Lorsque les pâturages sont frais et riches en espèces peu fourragères, le fromage sera plus fondant et amer. Lorsque la pâture d’altitude est sèche le fromage aura un goût plus fruité rappelant la noisette.

Salade Reblochon Fromage de Savoie recette printemps Pochat et fils

Salade printanière au Reblochon de Savoie AOP

Parmi les règles à avoir en tête quand vous arrivez acheter un fromage de printemps, sachez que le Reblochon est à consommer au printemps et en été, et que le Beaufort d’été  et autres pâtes pressées cuites qui ont un affinage plus long, se consomment en hiver. Voici quelques idées recettes pour déguster les fromages de Savoie autrement.


 Le saviez-vous ?
Pour qu’un fromage bénéficie de l’appellation AOP Reblochon ou Beaufort, les troupeaux doivent paître au moins 150 jours par an.


 

Acheter des fromages de montagne au lait cru, c’est se délecter d’un goût fruité et fleuri mais c’est aussi contribuer au maintien de cette montagne vivante, un patrimoine humain d’une richesse inégalée. Et participer à l’entretien d’une montagne humaine et pérenne.


Catherine Claude  / Axiuba Communication

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Les troupeaux de nos montagnes

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